L’Amazonie
Après un vol sans histoires nous atterrissons à Manaus à la tombée de la nuit. On se contente donc de manger quelques chose à l’hôtel avant une bonne nuit de repos en prévision de la semaine active qui s’annonce… Le lendemain on vient nous chercher à l’hôtel à 9 heures et nous partons pour une visite du marché coloré de Manaus. Il y règne une ambiance frénétique et éclectique car c’est d’ici et du port tout proche que tous les produits locaux sont dispatchés dans les régions environnantes. Nous rejoignons ensuite le port où nous prenons possession de notre bateau en bois typique de l‘Amazonie et faisons la connaissance de l’équipage qui va s’occuper de nous durant les 6 prochains jours.
Zeca le capitaine et Preto son second, Maria la cuisinière ainsi que Rico qui sera notre guide et qui parle très bien le français. On commence la navigation en allant vers l’aval du Rio Negro jusqu’à la zone de rencontre des eaux. C’est le lieu où les eaux noires du Rio Negro rencontrent les eaux brunes de l‘Amazone, avec un phénomène curieux qui veut que les eaux des deux fleuves mettent quelques dizaines de kilomètres pour se mélanger. Ceci est causé par les différences de densité, de vitesse d'écoulement ainsi que de température, entre les eaux limoneuses et ocres de l’Amazone et les eaux noires du Rio Negro. Après avoir vu le fleuve Amazone, nous faisons demi-tour afin de remonter le Rio Negro. C’est en effet sur ce dernier que se déroule la majorité des croisières en Amazonie, car il y a beaucoup moins de moustiques et également pas de risques de piraterie.
Après le repas de midi on apprend la technique pour attacher nos hamacs sur le pont supérieur, avant de faire une petite marche jusqu’au lac aux nénuphars. Malheureusement les eaux sont trop basses et ce n’est plus la saison des nénuphars, mais l’on peut tout de même voir quelques singes écureuils et capucins, ainsi qu’un paresseux qui se prélasse tout en haut d’un arbre. Nous apprenons aussi que les indigènes qui habitent le long du fleuve vivent dans des maisons flottantes qu’ils déplacent quotidiennement au gré des variations de niveau de l‘eau. En effet, entre la saison des pluies et la saison sèche, le niveau du fleuve varie de plus de quinze mètres, ce qui est énorme. En fin de journée nous reprenons la navigation jusqu’au coucher du soleil avant d’amarrer le bateau pour la nuit.
On se réveille à 5h30 après une nuit infernale. Lors de la réservation nous avions le choix entre dormir en hamacs sur le pont ou en cabine climatisée, moyennant un supplément. On a choisi la cabine climatisée mais personne ne nous a averti du bruit que cela implique. En effet pour alimenter la climatisation ils doivent allumer une génératrice qui doit dater de la dernière guerre mondiale. Le moteur fait un bruit infernal et le bateau vibre de toute part, donnant l’impression de dormir sur un compresseur. Je considère ça comme une malhonnêteté de la part de l’agence et je vais le faire savoir, mais pour l’instant on ne peut rien y changer, à part essayer de passer les prochaines nuits dans les hamacs. Sinon la journée est consacrée à la découverte de la jungle.
On commence par une marche de 3 heures et demi dans la forêt tropicale où la végétation est très dense. Des arbres énormes, des lianes qui s’enchevêtrent dans tous les sens et une chaleur étouffante accentuée par un taux d’humidité qui flirte avec les 100%. Nous ne voyons malheureusement pas beaucoup d’animaux, à part quelques araignées dont une superbe mygale. Après le repas de midi pris à bord, on fait une sieste réparatrice dans les hamacs avant une baignade rafraîchissante dans une piscine naturelle d’une rivière voisine. L’eau est bien fraîche et contraste vraiment avec les 30 degrés du Rio Negro. En fin de journée nous nous préparons pour une nuit à la belle étoile dans la jungle. On arrive au campement après avoir navigué en pirogue dans un dédale de lianes et de mangrove. Rico notre guide nous prépare quelques caipirinhas et Tonio fait griller un tambaqui (poisson typique de l‘Amazonie) au feu de bois. On passe la soirée autour de ce repas délicieux avant de rejoindre nos hamacs pour une nuit à l’écoute des bruits de la jungle.
La pluie qui était attendue durant la nuit est finalement arrivée au petit matin, et c’est sous un déluge tropical que nous avons quitté le campement afin de rejoindre le bateau. La nuit s’est relativement bien passée pour dire que c’était une première pour nous, tant au niveau du hamac que des divers bruits et cris des animaux de la jungle. Nous partons ensuite pour plus de quatre heures de navigation en remontant le Rio Negro afin d’atteindre le village indigène de Nova Esperança. Mais comme le chef du village est absent, nous reportons la visite au lendemain matin et effectuons à la place une balade en pirogue dans les environs du bateau. Ensuite apéro, repas et dodo assez tôt car une longue journée est prévue pour demain.
Beate est fatiguée par l’accumulation des mauvaises nuits et elle reste sur le bateau pour se reposer pendant que je vais visiter le village indigène de Nova Esperança. Les habitants vivent dans des cabanes en bois très simples et en harmonie avec la nature. Ils sont quasiment autonomes grâce à la pêche, à l’élevage de volailles et à la culture de toutes sortes de fruits tropicaux et de divers légumes, le principal étant le manioc. Sur place il y a une école, une église, une bibliothèque, un bar et deux restaurants pour les touristes. On peut aussi assister au processus permettant de produire la farine de manioc, qui est torréfiée au feu de bois.
Après cette visite très intéressante nous reprenons la navigation afin de retourner sur le cours principal du Rio Negro. On fait une nouvelle sortie en pirogue le long d’un bras du fleuve et l’on peut observer à la jumelle plein d’oiseaux et un paresseux. Il y a aussi beaucoup de singes écureuils qui sautent dans la pirogue, complètement surexcités par les morceaux de bananes que Zeca leur a apporté. Nous ressortons après la tombée de la nuit afin d’aller essayer de voir des caïmans qui sont très nombreux à cet endroit. La journée ils sont quasiment invisibles mais de nuit on peut les repérer grâce à leurs yeux qui reflètent dans le faisceau des lampes frontales. Nous voyons effectivement plusieurs paires d’yeux rouges et après plusieurs tentatives, notre guide Rico réussit à attraper un jeune spécimen afin que l’on puisse l’observer sous toutes les coutures. Un épisode impressionnant et une façon très intéressante de conclure cette belle journée.
Ici les journées commencent au lever du soleil et aujourd’hui nous allons pouvoir nager avec les fameux dauphins roses. Cette espèce de dauphin est endémique de l‘Amazonie et seuls les adultes sont roses, à cause de leur alimentation composée de minuscules crevettes en complément de petits poissons. Une expérience assez géniale que de pouvoir côtoyer ce cétacé à quelques centimètres et même de pouvoir le toucher. Sur place il y a aussi un bassin avec des Pirarucu que l’on peut appâter avec un poisson au bout d’une perche afin d’essayer de les extraire un peu de l’eau. C’est sportif car le Pirarucu est le gros poisson d’eau douce à écailles d’Amérique du Sud et il peut atteindre jusqu’à 3 mètres pour près de 200 kilos.
Ensuite nous faisons une petite visite du village métis de Acajatuba qui est situé au bord du lac du même nom. Ça nous permet de nous faire une idée sur les conditions de vie des habitants dont la source principale de revenus est l’artisanat. On termine cette journée par une petite baignade dans le lac Acajatuba suivie d’une tentative de pêche au Piranha. Beate, Rico et Zeca réussissent chacun à en attraper un alors que moi je rentre bredouille. Au final un total de trois petits piranhas qui va tout de même nous permettre de goûter ce poisson délicieux que l’on ne trouve pas au restaurant.
On est déjà arrivé au dernier jour de notre aventure amazonienne et il est temps de redescendre le Rio Negro en direction de Manaus. En chemin nous faisons une première halte au village indigène de Tatuyo où le chef de la tribu nous explique leurs us et coutumes. Les habitants nous présentent ensuite des chants et des danses traditionnels, ainsi que de magnifiques objets d’artisanat confectionnés par les indiens d‘Amazonie. On s’arrête encore sur le lieu où a été tourné le film “A Selva“ (la jungle) qui retrace l’épopée du caoutchouc en Amazonie. Cet endroit est aujourd’hui un musée que nous visitons en même temps qu’éclate un énorme orage tropical, comme pour nous signaler qu’il est temps de rejoindre le port de Manaus et la civilisation.
Il nous reste juste quelques heures avant de prendre notre vol pour retourner à Fortaleza, et nous en profitons pour nous balader au centre-ville de Manaus. La place São Sebastião et le Teatro Amazonas valent le détour, tout comme le vieux port et le marché municipal que l’on avait visité le premier jour.
On saisi l’occasion pour goûter le Tacacá qui est un plat d'origine indigène et un symbole de la cuisine amazonienne. C'est un bouillon chaud et acidulé fait de tucupi (jus de manioc fermenté), de goma de tapioca (fécule de manioc), de camarão seco (crevettes séchées) et de jambu, une herbe qui provoque une légère dormance sur la langue. Il est servi dans une cuia (bol en calebasse) et est réputé pour son goût fort et complexe. C’est spécial mais finalement assez bon à mon goût.
Ces six jours passés en Amazonie nous auront permis de nous faire une meilleure idée de cette immense région qui est tout simplement la plus grande forêt tropicale du monde. L’Amazonie c’est près de 7 millions de kilomètres carrés répartis sur neuf pays d’Amérique du Sud, dont près de 60% se trouvent au Brésil. Nous n’en avons visité qu’une minuscule partie mais ce furent six jours d’immersion totale dans cet univers unique qu’est le plus grand réservoir de biodiversité de la planète.
L’Amazonie